Les industriels de la charcuterie ne s’en vantent pas, mais dans les rillettes ou le pâté, il n’y a pas que du cochon charcutier, il y a aussi de la truie de réforme. Qu’ès acó ? Une stakhanoviste de la mise bas.
Pour donner naissance à 27 porcelets par an, contre 16 dans les années 70, l’animal a été allongé par les généticiens de l’Inra pour aligner 14 tétines au lieu de dix.
La grosse bête se
morfond trois ans dans un box riquiqui, où elle n’a rien d’autre à faire que lécher les barreaux de sa cage et se charger en métaux lourds.
Ajoutez-y des piquouzes en série pour faciliter les mises bas.
D’abord des injections d’œstrogènes afin de déclencher les naissances pile-poil au jour et à l’heure voulus ; Puis, le jour J, une piqûre d’ocytocine pour accélérer les contractions et l’éjection du lait, et, toujours pour augmenter la cadence, une dose de spasmolytique et de vasoconstricteur.
Plus tard, afin que ses tétines ne s’infectent pas, la truie aura droit à sa dose d’antibiotiques et d’anti-inflammatoires.
Histoire d’améliorer le quotidien des truies, l’Europe a décidé que, le 31 janvier 2012 dernier carat, elles auraient le droit de vivre avec des copines et dans plus d’espace : « les truies ont volontiers des interactions sociales avec d’autres porcs, à condition de disposer de leur liberté de mouvement », dixit ladite directive sur le bien-être des truies, qui date déjà de 2001…
Mais certains éleveurs font leur tête de lard.
La Coordination rurale (CR), l’un des trois syndicats agricoles, réclame à l’Europe trois ans de rab’ pour mettre aux normes les porcheries.
Motif : un cochon heureux protégé par Bruxelles coûte plus cher à produire qu’un cochon malheureux.
Comptez 1,30 centime d’euro de plus par kilo de carcasse ! On espère que Bruxelles ne se laissera pas marcher sur le groin !
Le Canard Enchaîné N° 4675 du 2 juin 2010